Luxembourg, grand gagnant provisoire d’une taxe mondiale

Le vendredi 4 et le samedi 5 juin à Londres, le sujet d’une taxe minimale sera au programme de la réunion des ministres des Finances du G7.
Le Luxembourg percevrait 283% de recettes d’IS en plus en 2021 si un taux minimal mondial d’imposition sur les sociétés de 25% était appliqué – loin devant l’Irlande (+168%) et la moyenne de l’UE (+50%). Un gain de courte durée, une telle taxe pouvant inciter ensuite les entreprises à déplacer leur siège.

Depuis que les États-Unis se sont déclarés favorables à un taux minimal mondial d’impôt sur les sociétés (IS), les discussions menées par l’OCDE depuis des années à ce sujet semblent près d’aboutir. Mais quel serait l’effet concret d’un tel taux d’imposition sur les rentrées fiscales des États?

C’est sur cette question que s’est penché le nouvel Observatoire européen de la fiscalité, un laboratoire de recherche chargé d’aider l’UE dans sa lutte contre les pratiques fiscales abusives, et dont le lancement a eu lieu ce mardi 1er juin.

Financé par l’UE (1,2 million d’euros pour la période 2020-2021) et rattaché à l’École d’économie de Paris, cet observatoire, dirigé par le professeur Gabriel Zucman, a commencé ses activités tambour battant, avec la publication d’un rapport sur la question.

Et les conclusions sont sans appel: si un taux minimal mondial d’imposition à 25% sur les entreprises était instauré en 2021, les recettes de l’impôt sur les sociétés perçues par les pays de l’UE gonfleraient de plus de 50% en moyenne, passant de 340 milliards d’euros perçus avec la fiscalité actuelle à environ 510 milliards – soit 170 milliards de gains sur une année.

Luxembourg, grand gagnant

Et le grand gagnant – apparent – d’une telle augmentation serait le Luxembourg. Celui-ci percevrait 7,9 milliards d’euros d’impôt sur les sociétés en plus en 2021 si un taux minimal d’imposition de 25% était appliqué. Ce qui correspondrait à une hausse de 282,3%, loin devant le deuxième «bénéficiaire», l’Irlande (+168%) – dont le gouvernement a récemment déclaré vouloir s’opposer à cette idée d’un taux minimal.

Le «bénéfice» à court terme de pays comme l’Irlande, Chypre ou le Luxembourg est bien sûr en trompe-l’œil, note le rapport. Un tel constat «laisse suggérer que les paradis fiscaux de l’UE bénéficieraient beaucoup d’une taxe minimum de 25%. Cependant, ces résultats sont liés à la supposition que ces pays garderaient les sièges d’entreprises qu’ils ont attirées jusque-là en offrant des taux faibles d’imposition sur les sociétés», précise l’observatoire. «En réalité, avec un accord international sur une taxe minimum, les sièges pourraient être déplacés dans des pays à haut taux d’imposition, ce qui signifie que les paradis fiscaux en bénéficieraient moins que ce que nous évaluons (et que d’autres pays en bénéficieraient davantage).»

Au programme du G7

Le sujet d’une taxe minimale sera au programme de la réunion des ministres des Finances du G7, le vendredi 4 et le samedi 5 juin à Londres. Sera notamment discuté le niveau du taux à mettre en place, qui suscite beaucoup de questions. Or, le rapport de l’observatoire insiste sur l’importance de ce point.

À 25%, l’UE percevrait donc 170 milliards d’euros en plus. Mais ce chiffre serait sérieusement revu à la baisse en cas de taux à 21% (98 milliards de recettes fiscales en plus) et presque divisé par quatre en cas de taux à 15% (48 milliards de recettes en plus). Il passerait par contre à 270 milliards de recettes en plus en cas de taux à 30%.

«Le choix du taux minimum d’imposition est très important», juge donc l’observatoire, «et un accord sur un taux minimal bas est peu susceptible d’augmenter de manière significative les recettes fiscales à court terme dans l’UE (même si cela peut ouvrir la voie pour un plus haut taux d’imposition minimal dans le futur).»

De 21% à 15%

Les États-Unis ont dernièrement revu à la baisse leur proposition, suggérant un taux à 15%, au lieu de 21% à l’origine. Le 25 mai dernier sur Sky News, le ministre irlandais des Finances, Paschal Donohoe, avait insisté sur le fait que le taux irlandais de 12,5% sera encore en place «dans cinq ou dix ans».

Le ministre des Finances luxembourgeois, Pierre Gramegna (DP), s’était quant à lui déclaré favorable à un tel taux d’imposition . Avant de préciser que «certains pays européens, par exemple les petites économies ouvertes, comme les pays du Benelux, les pays scandinaves ou l’Irlande, ont des considérations spécifiques à valoriser et à mettre en avant».

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